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Fissure moteur en tours de piste
Ref : FM41GUJTOK

Dates

Date de déclaration : 24/12/2020
Dernière modification : 26/12/2020
Date de clôture : 26/12/2020

Descriptif de l'évènement

Deux vols successifs sur le même appareil à deux jours d'intervalle et un vol entre les deux qui n'a donné lieu à aucun commentaire le pilote n'ayant rien noté d'anormal.

1er pilote
Avant le vol, j'ai constaté que le niveau d'huile était à 5L, j'ai donc rajouté 0,5 avant le décollage, et ai fait tomber quelques gouttes dans le moteur, je ne me suis donc pas inquiété de l'odeur d'huile pendant le vol. (Qui d'ailleurs n'a été présente que lors du premier décollage)
Durant le vol j'avais l'impression que le moteur vibrait un peu, il y avait le bruit d'une tondeuse à gazon, comme si il lui manquait un cylindre ... Mais j'ai mis ça sur le fait de n'avoir pas volé depuis longtemps, et surtout, du givrage ! En effet, les nuages étaient bas (1200 ft) et je les frôlais durant le tour de piste. De plus la TEMSI annonçait du givrage dès 1500ft QNH. J'ai donc fait une bonne partie du vol avec la réchauffe, et à chaque fois que je mettais la réchauffe, le bruit anormal se calmait. NB : le bruit de tondeuse a gazon ne se faisait sentir que lors des accélérations, i.e à la remise des gaz, moment ou la manette de réchauffe était fermée.

2ème pilote
Je prévois un tour de piste standard, un touché, suivi d'un encadrement, un touché, un tour de piste basse hauteur, un nouveau touché, puis un tour de piste standard suivi d'un atterrissage complet. Temps de vol prévu 30' environ.
Je prépare mon vol, vérifie les papiers de l'avion, ainsi que le carnet de route. Rien de particulier. Les derniers vols remontent à deux jours avant le mien.
Vient ensuite la préparation de l'avion dans le hangar :
Je constate des traces d'huile sur le carénage de la roue avant. Cela ne m'inquiète pas trop, l'ayant souvent constaté sur les DR 400. Néanmoins, je trouve qu'il y en a un "petit peu plus" que d'habitude.
Je nettoie le carénage de roue et retire toute trace d'huile. Je vérifie le niveau d'huile, au-dessus de 5 quart (soit 5.2). Cela me semble cohérent par rapport au complément d'huile qui avait été fait 2 jours avant.
Après les purges, j'effectue ma visite-prévol, brasse le moteur, vérifie la propreté du carénage de la roue avant, pas de nouvelles traces d'huile.
La mise en route s'effectue assez facilement (à la 2ème tentative).
La température extérieure est de 6° (ATIS) et je laisse chauffer 9 minutes avant de débuter le roulage vers la piste 11 droite..
Point fixe effectué, essai magnétos OK, ralenti vérifié. Pression ok et température ok.
Aucun signe avant coureur de problème de moteur.
Le décollage s'effectue normalement, puissance ok. Cependant pendant la montée initiale, je ressens des vibrations, et le bruit du moteur me paraît inhabituel,
avec une sensation qu'il ne tourne pas "rond".
A cet instant, je me pose la question de ne faire qu'un tour de piste avec retour au parking.
Néanmoins, je grimpe normalement à l'altitude du tour de piste, les vibrations ne sont plus ressenties, les paramètres sont dans le vert (pression un peu élevée, température ne dépasse pas 60°).
Cela me redonne confiance dans le moteur, je décide de poursuivre ma séance de tours de piste, d'autant plus que les conditions extérieures sont favorables : peu de trafic, belle météo, vent dans l'axe.
Je reste malgré tout attentif et vigilant quant au bruit du moteur qui ne me semble pas "comme d'habitude".
La suite du vol se poursuit normalement, sans perte de puissance lors des re-décollage (touchés) et des montées, avec des paramètres toujours dans le vert, aucune alarme. Aucun incident pendant mon vol, ni aucune remarque du contrôle (Twr).
A mon retour au parking, lors de l'arrêt moteur, le pilote qui doit prendre la suite me fait signe et m'informe avoir vu de la fumée s'échapper du moteur.
Je descends rapidement de l'avion (j'ai déjà eu l'expérience d'un feux moteur au sol) pour vérifier le moteur.
Plus de fumée, mais je constate de grosses traces d'huile sur le carénage de la roue avant. J'en déduis forcément une fuite d'huile importante et probablement une avarie dans le moteur (cylindre ?).
J'informe le responsable maintenance de l'aéro-club et nous décidons dans ces conditions d'arrêter l'avion.
L'huile continuera de s'écouler.
Après démontage des capots moteur, il est constaté que le carter moteur est fissuré. Le moteur doit être changé.

1er Pilote
J'ai bien sûr avidement surveillé les paramètres moteurs, la pression d'huile, était limite forte (l'aiguille entrait dans le l'orange), et la température étonnamment basse... Je ne pouvais donc pas conclure à un problème du circuit d'huile. Notez tout de même qu'à l'arrêt, (batterie coupée), l'aiguille restait dans la même position, juste avant l'entrée de la plage verte, ce qui a posteriori m'a conforté dans l'idée d'une panne d'instrument dont j'ai informé le mécano, mais je n'ai omis de lui signaler les phénomènes constatés

2ème pilote

Mon ressenti ou analyse côté facteurs humains :
- J'ai constaté un peu plus d'huile que d'habitude sur le carénage de roue, pourtant le check du niveau d'huile normal m'a persuadé de ne pas m'inquiéter davantage.
- Pas d'infos ou remarques particulières des pilotes ayant volés sur l'appareil récemment.
- Lors du premier décollage, je me suis posé la question si je me limitais à un tour de piste et stoppais mon entraînement. Malgré tout, le fonctionnement "normal" du moteur m'a persuadé de continuer..
- Étant en tour de piste, la proximité d'une aire proche pour me poser m'a rassuré ("en cas de souci, la piste n'est pas loin").
- Donc je suis rentré dans une phase de persuasion : je me suis persuadé que comme le moteur fonctionnait, avec une puissance normale,
que les paramètres étaient dans le vert, je pouvais "continuer", avec une piste proche...

Classification de l'évènement

La déclaration concerne : Sécurité des vols (SV)
Catégorie : Matériel
Nature du vol : VFR Jour
Conditions météo :
Environnement : Contrôlé (Classe A, B, C, D, E)
Phase de l'évènement : En tour de piste
Type de vol : Solo pilote
Type d'évènement : Moteur: Problème
Type d’aéronef : DR 400/120
Equipement : Instrumentation classique (aiguille)

Evaluation du risque

Traitement de l'évènement


Les deux pilotes ont remarqué que le moteur ne semblait pas tourner rond mais ont malgré cela décidé, en se fondant chacun sur une analyse différente de la situation, de continuer leur vol.
Le pilote 1, bien qu'il ait un doute (cf commentaire "ce qui a posteriori m'a conforté dans l'idée d'une panne d'instrument"), se raccroche aux paramètres moteurs qui sont corrects et au fait que lorsqu'il tire la réchauffe le moteur tourne rond. Il pense donc que le problème est probablement du au givrage. De plus l'odeur d'huile a disparu.
Le pilote 2 quant à lui se rassure en constatant également qu'à l'altitude du TdP le phénomène disparait (puissance réduite) et en se sachant proche du terrain.
Il s'agit dans les deux cas d'un biais de confirmation dans la décision de poursuivre -objectif destination reprise des TdP après confinement - ; un même constat et une même décision mais fondée sur deux raisons différentes.

Actions correctives :
Diagnostic : Fissuration du carter moteur.
Le moteur étant dans ses prolongation (environ 2600h), changement du moteur.

Actions préventives :
Publication d'un REX rappelant aux pilotes :
- qu'un moteur qui ne tourne pas rond doit être l'élément unique de décision d'interruption du vol. Il faut envisager que le problème remarqué soit un vrai problème et que la panne définitive puisse se produire n'importe quand, y compris en montée initiale, surtout à un QFU naturellement problématique.
- Dans les phases autres que le décollage, la proximité du terrain n'est pas forcément une garantie d'un atterrissage réussi ; en vent arrière la hauteur du TdP (800ft) laisse moins d'une minute avant le toucher, et en finale c'est le posé avant le seuil de piste.
- Lorsque le niveau d'huile est à 5 il et inutile d'en ajouter pour un vol de courte durée, au risque de la voir couler sur le carénage de la roulette.
- Une forte pression d'huile et une température basse sont fréquentes par temps froid
- Qu'en cas d'anomalie constatée, il est primordial d'informer au moins un des responsables du club, en particulier le mécanicien.

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