Gamme Aérogest : logiciel de gestion pour l'aviation
Rupture du train principal gauche suite à un exercice d'enca
Ref : EOBYZXJ7HN

Dates

Date de déclaration : 10/02/2022
Dernière modification : 10/02/2022
Date de clôture : 10/02/2022

Descriptif de l'évènement

Redécollage et montée annoncée à la Tour vers une verticale terrain à 2000 ft sol. Simulation de panne moteur (gaz tout réduit) ; recherche de panne, stabilisation et compensation de la Vitesse, rejointe d’un début rapproché de vente arrière (l’élève pilote l’avion) .
Le vent arrière en descente est un peu éloigné. Le CTLS est un avion « trompeur » en ce domaine. La finesse, qui avait été précisée lors du briefing, est de 8,5/1 alors que l’aspect « léger » de l’avion donne l’impression d’une meilleur capacité de plané. Malgré le guidage verbal l’élève ne converge pas assez. Après l’avoir clairement annoncé à voix haute, l’instructeur reprend les commandes pour « poursuivre pour démonstration ». A partir de ce moment l’élève ne touchera plus aucune commande (manche, palonnier, gaz, etc.).
L’instructeur décide et annonce qu’il n’est plus possible d’aller se poser au seuil de piste mais que, en convergent très rapidement, il sera possible de se poser environ au premier tiers de la piste en dur qui fait 1100m.
La configuration est Volets 2, tout réduit. La forte convergence à environ 90° de l’axe conduit à un virage à très faible hauteur. L’instructeur a vérifié au cours de ce virage, une à deux secondes avant le contact avec le sol, la vitesse (59kt) et la bille (sensiblement centrée). Il a déclaré ne pas se souvenir avoir entendu la moindre alerte sonore (avertisseur de décrochage). L’élève, interrogé sur ce point, n’a pas non plus souvenir d’une alarme sonore.
A une très faible hauteur normale pour un touché (il semble à l’instructeur que le vol est à la bonne hauteur et à la bonne assiette pour un touché) l’aéronef est encore incliné (estimation : 10 à 20° d’inclinaison gauche). Le nez est sensiblement dans l’axe mais la fin du virage laisse encore perdurer une vitesse tangentielle de la gauche vers la droite. Il n’y a pas d’inquiétude particulière de la part de l’instructeur lorsque l’avion soudainement décroche. L’instructeur n’est pas capable de dire si ce décrochage est symétrique ou ne concerne que l’aile gauche. Car vu la très faible hauteur le choc du train gauche sur le sol est immédiat.
Donc, du fait de l’inclinaison seul le train gauche frappe le sol. Le choc est violent. La remise de puissance est instantanée et l’avion se stabilise en montée initiale.
L’élève déclare tout de suite: « ça a été violent ; on a rien abimé ? ». L’instructeur répond «  oui, on a tapé fort mais un train principal c’est solide. On le signalera après le vol pour que la mécanique vérifie qu’il n’y a rien de sérieux ». A cet instant il n’a pas encore conscience du bris du train, simplement il n’est pas satisfait et un peu « secoué ».
C’est le message de la Tour « F-xx, pas de problème, ça va » sur un ton très interrogatif, ajouté au commentaire de l’élève, qui le conduit à penser que le choc a effectivement été TRES violent.
Il décide de faire un tour de piste basse hauteur et de se présenter avec les volets 1 en conservant la vitesse et avec une très faible assiette positive pour « tester le train gauche », (dans une sorte « d’atterrissage de piste » si l’avion avait été un train classique). Il annonce cette intention à la Tour puis l’exécute.
Le train droit touche la piste et il n’y a aucune résistance à gauche (l’avion s’incline de 10° environ). Il en conclut que le train gauche est endommagé et demande, malgré sa fermeture officielle, à se poser sur la piste en herbe pour minimiser les dégâts. L’autorisation lui est donnée et il effectue un second tour de piste à basse hauteur. Il lui est demandé de patienter en fin de vent arrière (un a deux 360°) pour faire poser un aéronef en tours de piste dans le cas où l’aérodrome devrait être fermé. Il annonce qu’il se posera sur la gauche de la piste en herbe pour essayer de ne pas bloquer la piste (les pistes en herbe et en dur ne sont pas séparées à LFXX).
Il applique de mémoire la check-list pertinente dans ce cas d’urgence (essence fermée, arrêt du moteur, magnétos coupées), volets 3 et vitesse minimale.
Il se pose hélice arrêtée, assiette positive et maintien, tant que les gouvernes sont efficaces, de l’aile gauche horizontale à l’aide du manche dont le déplacement évolue jusqu’en butée à droite.
Lorsque la portance de l’aile n’est plus suffisante du fait de la vitesse trop faible, l’avion se couche sur le flanc gauche et glisse vers la gauche. Il s’immobilise quelques mètres à l’extérieur de la piste en herbe. La piste en dur restera utilisable, hormis les interruptions qui seront dues à l’évacuation de l’avion accidenté.
A l’immobilisation de l’avion, élève et instructeur constatent et se confirment qu’ils n’ont aucun mal (tout a été relativement « doux », en fait). Il y a un message radio avec la Tour pour confirmer qu’il n’y a pas de problème majeur. L’instructeur est incapable de se souvenir s’il avait remis la batterie et la radio en marche après l’immobilisation de l’avion (car il pense avoir fait la check liste complète avant l’atterrissage d’urgence, incluant batterie sur off), ou s’il avait laissé la batterie et radio car (il lui semble curieux d’avoir pensé à ce moment-là à les remettre en route pour parler avec la tour).
Après vérification que tout est coupé et arrêté, élève et instructeur sortent de l’avion par la porte droite.
Là encore plusieurs dizaines d’années de pratique, un bon nombre d’élèves formés et de tests réalisés, la perception d’une bonne considération par ses pairs et l’autorité de tutelle, ne doivent pas conduire à un excès de confiance. Là encore je pensais m’en être protégé. Là encore la leçon est qu’avant l’accident on ne pense jamais que celui-ci surviendra.
De plus j’avais coutume de dire et répéter « qu’on abime un avion en se posant sur le nez, en rendant la main au rebond » mais « qu’un avion est solide et que pour casser un avion sur le train principal il y a peu de risque ». Cette excès de confiance, que je communiquais donc à mes élèves, dans la résistance du train principal trouvait aussi sa source dans le vol montagne et le vol de nuit où j’ai toujours veillé à ce que les élèves s’écartent de préférence légèrement vers « une assiette à peine trop forte » plutôt que « à peine trop faible ». Désormais je modérerai ce propos et serai sans doute un peu moins tolérant pour des atterrissages « un peu durs ». J’y ajoutera verbalement les deux risques complémentaires déjà évoqués ci-dessus, à savoir « en cas de posé sur une roue (par vent de travers fors, l’énergie supportée par le train qui touche est double » et « attention à la vitesse tangentielle si le vent est mal corrigé ».
Enfin je réalise que j’ai voulu aller trop vite avec un élève familier avec le monde aéronautique et qui démontrait de bonnes aptitudes au pilotage. Je n’ai pas su faire la différence entre son aisance globale dans ce monde et les actions concrètes sur les commandes. J’ai voulu lui faire apprendre » trop vite ». En effet, avec le recul, il est stupide d’avoir voulu, au premier encadrement , lui expliquer qu’en cas de panne il ne faut pas renoncer et poursuivre jusqu’au bout.
Je réalise enfin que je me suis stupidement pris au jeu et ai laissé se mélanger dans mon esprit un exercice et une situation réelle. Si j’avais été en panne réellement en campagne, le pilotage aurait été compréhensible. L’avion aurait été brisé mais les vies je l’espère sauvées. Est-ce pour démontrer l’étendue de mes compétences que j’ai mélange deux choses et ai poursuivi le vol sans vouloir réaliser à temps que je formais un élève et que c’était un exercice où je n’avais pas à prendre un tel risque ?.
Enfin j’insisterai encore plus sur la nécessité et la pertinence de la remise de gaz si la trajectoire et les paramètres ne sont pas stabilisés avant une hauteur d’au moins 300 ft
L’expérience apporte un calme relatif pendant l’événement. Cependant, quelle que soit l’expérience, on perd une bonne partie de ses moyens en situation d’urgence. Le champ de perception se concentre sur l’essentiel et les perceptions périphériques s’estompent. Ainsi, je suis surpris de ne pas être en mesure de me souvenir avec certitude de la présence ou non d’une alarme sonore, du caractère symétrique ou non du décrochage à très basse hauteur ni de l’arrête/remise en route ou non de la radio. Cette réduction de ses capacités ne peut être compensée que par une forte formation et un sur apprentissage des procédures d’urgences.
L’application la remise de gaz est une manœuvre normale en avion. Si j’avais laissé l’avion s’affaisser lors du premier choc sur la piste en dur, les dommages auraient probablement été plus graves.
Bien que j’ai toujours été vigilant et tente de me protéger sur ce point, cet accident confirme hélas qu’une pratique régulière et « sans histoires » risque toujours de conduire à un excès de confiance. Je n’ai pas su conserver la marge suffisante entre « ce que je sais faire » et « ce que je m’autorise à faire ».
Les premières actions des enquêteurs ont été, très courtoisement, un vérification de l’alcoolémie et une vérification approfondie des documents avion et pilote. Tout était en règle mais je souhaite souligner l’importance de ces points qui permettent ensuite une analyse professionnelle sereine de l’accident ;
Je n’avais pas réalisé avant ce jour que se poser sur une roue fait peser sur une jambe de train la totalité du choc et de l’accélération de la masse de l’avion. Au vu de la hauteur réellement faible du décrochage final et au vu de ma réaction à la remarque de l’élève « ça a tapé fort », je pense que si le choc avait été réparti de façon homogène sur les deux jambes de train (division par deux de l’effort) il aurait été possible que l’atterrissage soit certes brutal mais sans rupture de la jambe de train, comme l’illustre ma réponse spontannée « oui c’était dur, on le signalera à la fin du vol).
Je n’ai pas pris conscience au moment du touché que, bien que le nez ait été à peu près dans l’axe, le mobile conservait une vitesse perceptible tangentielle de la gauche vers la droite, qui a sans aucun doute contribué au bris de la jambe de train. Je m’en souviendrai et le préciserai en tant qu’instructeur (cf.infra).
Il ne faut pas céder à la bienveillance et de la gentillesse des personnes qui vous soutiennent immédiatement après l’accident. Avec d’excellentes intentions ils vous orientent vers une recherche d’explications extérieures à votre responsabilité (« il y avait peut être déjà eu un atterrissage dur sur cette jambe de train qui l’avait affaiblie », ou « avec un vent du Nord les hangars créent parfois des rouleaux »).

Classification de l'évènement

La déclaration concerne : Sécurité des vols (SV)
Catégorie : Non défini
Nature du vol : VFR Jour
Conditions météo : Vent faible 350°/5-7kt ; CAVOK ; Piste 30 en service
Environnement : Non Contrôlé (Classe F, G)
Phase de l'évènement : A l'atterrissage
Type de vol : Instruction double commande
Type d'évènement : Atterrissage dur
Type d’aéronef : Flight Design CTLS
Equipement : Instrumentation "Full Glass Cockpit"

Evaluation du risque

Traitement de l'évènement


Synthèse:
Bonnes conditions météorologiques avec un vent du nord, la piste 30 est en service. Les événements interviennent dans une RMZ avec présence du contrôle.
Dans le cadre d'une formation initiale PPL, l'élève et l'instructeur prépare une séance de vol sur les urgences, seront abordés :
accélération arrêt, panne mineure/majeure après le décollage, atterrissage forcé, interruption volontaire du vol.
Après une première série d'exercice de pannes, l'instructeur décide de passer aux atterrissages forcés avec la technique dite de l'encadrement.
L'avion se reporte verticale terrain, à environ 2600ft AMSL pour débuter l'exercice d'encadrement.
La recherche de panne et la mise en assiette de meilleure plané de l'avion se passe normalement.
Malgré le guidage verbale de l'instructeur l'élève tarde à virer en vent arrière puis en base.
L'instructeur décide alors de reprendre les commandes et indique à sont élève qu'il va effectuer une démonstration.
L'instructeur vise alors un point d'aboutissement situé au 1/3 de la piste 30 avec une convergence à 90° avec la piste.
La configuration machine est alors volets 2, moteur réduit et vitesse d'environ 59kts.
Le fort angle de convergence amène à faire un virage important à très basse altitude.
Alors que l'avion termine son virage pour s'aligner avec la piste, l'avion décroche et tombe sur la jambe de train gauche seule. A ce moment l'avion possède encore une inclinaison comprise entre 10° et 20° à gauche avec une composante de vitesse latérale importante et une hauteur d'environ 1 à 2 mètres.
L'équipage ne se souvient pas d'avoir entendu d'alarme de décrochage pendant la manœuvre.
L'instructeur remets immédiatement les gaz mais n'a pas conscience d'éventuels dommages sur le train d'atterrissage.
Il demande alors a effectuer un atterrissage de précaution pour tester le train gauche. Celui-ci s'efface peu à peu et l'instructeur interrompt l'atterrissage.
Il se représente à nouveau pour un atterrissage de précaution en connaissance de la condition du train gauche. La piste 30 herbe, bien que fermée est demandée pour limiter les dégâts suite à un atterrissage en train gauche fonctionnel.
Après l'atterrissage l'avion s'arrête à mi-piste sur le flanc gauche.
L'instructeur sécurise l'avion puis préviens la gendarmeries et l'aéroclub.

Analyse :
L'atterrissage dur est dû au décrochage de l'avion à une hauteur d'environ 2 mètres de sol. L'impact avec un vitesse latérale importante et un axe non aligné avec celui de la piste provoque des contraintes importantes sur le train d'atterrissage qui se plie à l'impact sur le coté gauche. En effet la résistance du train d'un avion est limitée pour des forces latérales importantes par rapport aux charges verticales.
La décision de continuer l'exercice a été provoqué par un excès de confiance de la part de l'instructeur qui a repris une trajectoire difficile non compatible avec un approche stabilisée. L'angle d'approche a nécessité un virage important à basse hauteur.

Conclusion :
L'atterrissage dur est dû à la volonté de l'instructeur de continuer un exercice d'encadrement alors que l'approche n'est pas stabilisée.

Actions correctives :
1/ Réparation et inspection de l'appareil par l'atelier de maintenance
2/ Débriefing et vol de contrôle de l'instructeur par le chef pilote.

Actions préventives :
1/ La commission prévention ré-itère (voir Rex EOBVX4IYBV) la recommandation de mise en place de critères de stabilité pour les approches.


Cet événement a fait l'objet d'un rapport du BEA (référence BEA2018-0661).
Le lecteur pourra utilement s'y reporter en cas de besoin.

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