1) Contexte pré-vol : 1er vol solo avec un passager (non-pilote) suite à l’obtention de ma licence PPL le 09/02/22 (58 heures de vol au total).
2) l'avion : / APM20 immatriculé FGXXX – 2eme vol de la journée. Aucun élément ne permettait de remettre en cause le bon déroulement du vol après lecture du carnet de route et discussion avec le pilote du vol précédent. Seul le disfonctionnement du conservateur de cap était connu avant le vol ne remettant pas en cause la réalisation de ce dernier après lecture de la LME. La visite pré-vol n’a pas mis en évidence d’anomalie particulière. Le plein de carburant n’a pas été refait avant le vol (réservoir rempli au ¾. Autonomie suffisante pour le vol et marge de sécurité plus importante vis-à-vis de la masse maximale admissible relativement faible sur AMP20).
3) Informations sur le vol prévu : Cheminement depuis LFNE (Salon Eyguières) jusqu’au point de compte rendu S au large de Carry le Rouet (LFNE->W->SB->SA->S) puis transit côtier jusqu’à WT -> LFMQ -> Sainte Victoire -> LP (Saint Cannat) -> retour sur LFNE via LFMY ou transit par la Durance en fonction des clairances. L’autonomie au décollage était de 3h pour un vol estimé d’1h11. Pour parer à toutes les éventualités, en plus de la carte 1/500 000, des cartes VAC, du log de navigation et du GNS430 installé à bord, 1 téléphone portable et 1 tablette, tous deux connectées à l’application SDVFR, étaient présentes à bord. Le passager et moi-même étions équipés de gilets de sauvetage comme le prévoit les règles de survol maritime.
4) les faits : Peu avant mon arrivée au point de compte rendu S, j’ai demandé l’autorisation au contrôleur de la CTR Marseille Provence de sortir du transit côtier pour effectuer un survol de la rade de Marseille. Après avoir reçu son autorisation, conditionnée au respect d’un plafond maxi fixé à 1000ft, j’ai réduit mon altitude passant de 1500ft à 900ft avant d’effectuer le survol de la rade.
J’ai recontacté le contrôleur quelques minutes plus tard pour lui indiquer que je souhaitais réintégrer l’itinéraire côtier à partir du point SC. Ce dernier m’a autorisé à poursuivre vers SC pour intégrer le transit côtier à une altitude de 1700ft. En sortant de la CTR et n’ayant pas eu de contact radio pour quitter la fréquence, j’ai de nouveau sollicité le contrôleur pour lui demander l’autorisation de basculer sur la fréquence de Provence7 (132.950). Ce dernier m’a alors demandé de rester sur la fréquence et de poursuivre ma montée jusqu’à « SC ». Ce fut la dernier échange radio avec le contrôleur avant l’incident.
Une fois le point SC atteint, j’ai procédé aux « vérifications point tournant » afin de poursuivre mon vol. J’ai alors constaté que l’aiguille du tachymètre s’affolait oscillant entre 1000Tr/min et 5500Tr/min sans pour autant que cela ne soit perceptible au niveau du moteur. J’ai instinctivement contacté le contrôleur pour l’informer de la situation tout en procédant à une rapide vérification de la position du contact allumage (ce dernier était bien sur la position attendue à savoir 1+2 ou « both »). En l’absence de réponse du contrôleur, j’ai poursuivi mes investigations avant de constater rapidement que le GNS 430 était éteint tout comme le transpondeur. L’intercom fonctionnait toujours ce qui m’a permis de communiquer avec le passager pour le rassurer. Ces différents éléments m’ont permis d’en déduire qu’il s’agissait vraisemblablement d’un problème d’ordre électrique.
J’ai alors suivi la procédure « panne électrique » en vérifiant la position de l’interrupteur de batterie et l’état des fusibles. N’ayant constaté aucune anomalie, j’ai poursuivi la procédure en coupant puis en réenclenchant la batterie. Cette manœuvre m’a permis de récupérer le transpondeur et le GPS. J’ai rapidement affiché le code transpondeur 7600 pour informer les contrôleurs du problème de communication avant de tenter de les recontacter par radio sans succès (la radio et le GPS se sont de nouveau coupés, l’écran du GPS s’allumant et s’éteignant en boucle pendant 5 à 10min, l’intercom est resté opérationnel). A noter que le transpondeur semblait fonctionner correctement (le code transpondeur est resté lisible jusqu’à l’arrêt du moteur).
le vol devait donc se poursuivre sans radio/radio nav, sans horizon artificiel ni indicateur de virage (gyroscopes électriques, le conservateur de cap étant déjà HS), sans GNS430 (je disposais toujours d’une carte 1/500 000, d’une tablette et d’un téléphone portable connecté à SDVFR me permettant d’assurer la précision de mes trajectoires), mais surtout sans volets pour l’atterrissage (volets électriques).
Nota : Je n’ai pas jugé bon, sur le moment, de couper totalement l’alimentation électrique afin de garder le transpondeur opérationnel et ainsi transmettre les informations nécessaires aux contrôleurs (altitude, vitesse, code transpondeur) et ce, malgré mes craintes liées à un départ de feu provoqué par un court-circuit.
Fort de ce constat et ne parvenant pas à résoudre ce dysfonctionnement, 2 possibilités s’offraient à moi : • Poursuivre sur le transit côtier jusqu’au point WT et me dérouter vers l’aérodrome du Castellet • Opérer un demi-tour et rentrer sur Eyguières en pénétrant dans une CTR sans autorisation
Malgré une distance plus importante à parcourir et connaissant les restrictions de pénétration d’une CTR sans contact radio, J’ai pris la décision de faire demi-tour pour les raisons suivantes : • Le moteur ne présentait aucun signe permettant de remettre en cause sa fiabilité (le circuit électrique étant indépendant des magnétos),
• En l’absence de risque moteur, j’ai estimé qu’il était plus prudent pour notre propre sécurité de se dérouter sur un terrain dégagé que je connaissais parfaitement sachant que les volets étaient devenus inopérants (il y avait déjà trop d’inconnus compte tenu de la situation et je ne voulais pas accroitre la difficulté et le stress en me déroutant sur un aérodrome que je ne connaissais pas. La carte VAC du Castellet était présente à Bord, mais je n’avais aucun repère physique sur cet aérodrome et ne maitrisais absolument pas l’environnement contrairement au terrain d’Eyguières sur lequel j’ai déjà eu l’occasion d’atterrir sans les volets lors de ma formation et que je connaissais parfaitement),
• Le trajet emprunté était majoritairement au-dessus d’étendues d’eau relativement calmes (vent faible, vagues très peu marquées sur la méditerranée et l’étang de Berre) ou de zones peu habitées. Ma seule crainte à ce moment-là était de devoir faire face à un évènement plus grave tel qu’un feu électrique ou une panne moteur (sans forcément avoir de rapport avec la panne électrique) nécessitant de se poser en urgence. Par conséquent, un atterrissage/amerrissage de précaution restait envisageable sans mettre en danger d’autres personnes. De plus, la proximité de Marseille et l’aéroport de Marignane nous garantissait l’intervention rapide des secours (maritime, aérien ou terrestre) en cas de problème. Nous étions également équipés de gilets de sauvetage,
• N’étant pas certain de la nature exacte du problème, je ne voulais pas solliciter d’avantage le moteur en reprenant de l’altitude pour atteindre l’aérodrome du Castellet en toute sécurité (je craignais tout particulièrement un effet domino ne sachant pas si les vibrations et/ou la montée en T° du moteur pendant cette phase d’ascension pouvaient aggraver ou non la situation),
• Une fois ma décision prise, j’ai préféré aller de l’avant afin d’éviter toute tergiversation qui aurait pu nous faire perdre un temps précieux et nous mettre davantage en danger,
• Le transpondeur semblait fonctionner et je n’avais pas quitter la fréquence de la CTR Marseille Provence avant l’incident (bien qu’en dehors de la CTR j’avais le sentiment d’être encore rattaché à cet espace aérien faute d’avoir pu préalablement quitter la fréquence convenablement). J’étais sur un transit côtier connu et étudié pour ne pas interférer avec les procédures IFR, et l’utilisation du transpondeur devait permettre aux contrôleurs de connaitre ma position tout comme ma direction, mon altitude et mon problème radio. J’ai donc pensé que le contrôleur pourrait en déduire mes intentions tout en ayant suffisamment d’informations sur son écran pour assurer l’espacement avec les autres vols (je n’ai su qu’après coup que la fonction alticodeur du transpondeur était HS). Je pensais également qu’un vol retour à basse altitude sans croiser les axes de piste permettrait de ne pas perturber le trafic,
• Le contexte local complexe a également faussé mon jugement au moment de prendre cette décision. Les restrictions de survol du parc naturel des calanques (malgré le transit côtier qui le traverse, la hauteur mini de survol du parc étant supérieure à la TMA Provence 7), la CTA de Toulon 2 qui tangente ce parc, la proximité des villes de La Ciotat / Saint Cyr sur mer / Bandol, la TMA Provence7 au-dessus du transit et le relief local ont faussé mon jugement. J’ai pensé, à tort, devoir soit pénétrer dans la CTA TOULON 2 (confusion lors la lecture de la carte 1/500 000, j’ai confondu CTA et CTR et j’en ai déduit que la limite inférieure de la zone était forcément le sol) pour rejoindre le terrain du Castellet en contournant les villes précédemment citées, soit de ne pas respecter les hauteurs minimales de survol ce qui, dans les 2 cas, constituait également un infraction aux règles de l’air. En réalité, il y avait 2 possibilités pour rejoindre le Castellet sans enfreindre ces règles : ->Redescendre sous 1000ft (sans en avoir informé préalablement le contrôleur et sur un itinéraire très fréquenté) pour passer en dessous de la CTA de Toulon 2, contourner les villes côtières puis reprendre de l’altitude pour rejoindre le Castellet. ->Emprunter un couloir inférieur à 0,5Nm entre le parc et la CTA Toulon 2 en s’aidant de la tablette et de SDVFR avant de contourner les villes côtières puis reprendre de l’altitude pour rejoindre le Castellet. Toutefois, dans les 2 cas, il fallait nécessairement reprendre de l’altitude pour rejoindre le Castellet afin d’effectuer une verticale terrain puis une intégration standard (tour de piste à 2400ft), chose que je souhaitais éviter pour les raisons évoquées précédemment.
A noter que la recherche de panne, l’analyse de la situation et la prise de décision ont été réalisés dans un laps de temps relativement court (entre les points SC et SR soit 3 min tout au plus).
Une fois le demi-tour effectué, J’ai tenté de trouver rapidement un numéro de téléphone pour contacter les contrôleurs en utilisant la carte VAC Marseille Provence avant d’abandonner l’idée pour me concentrer sur le pilotage et la sécurité extérieure en cherchant d’éventuels trafics conflictuels (le stress n’aidant pas dans ce genre de situation, je ne suis pas parvenu à trouver rapidement le numéro de téléphone qui répondait à mon besoin et n’ai pas eu la présence d’esprit de demander à mon passager d’effectuer cette recherche à ma place).
J’ai donc suivi le transit côtier jusqu’au point S en respectant la dernière altitude indiquée de 1700ft. Après avoir franchi le relief de la cote bleu, j’ai réduit mon altitude pour atteindre 1000ft en me dirigeant vers l’Ouest de la CTR afin de ne pas gêner les autres trafics en approche sur Marseille Provence tout en veillant à ne pas pénétrer dans la CTR d’Istres.
J’ai contourné les villes de Saint Chamas et Miramas puis, une fois à portée du terrain d’Eyguières, j’ai décidé de reprendre de l’altitude une dernière fois pour procéder à une verticale terrain à 1500ft, évaluer l’environnement (trafics, vent, piste en service) avant de faire une intégration standard. Toutefois, lors de la remise des gaz, j’ai eu l’impression que le bruit du moteur était différent (le passager a eu la même impression, était-ce réel ou était-ce lié au contexte ?). J’ai également constaté un bruit de grésillement sur l’intercom avant qu’il ne cesse lui aussi de fonctionner.
Compte tenu de ces nouveaux éléments, et après un dernier coup d’œil sur la piste et les environs (2 avions en attente piste 15), J’ai alors pris la décision de ne pas faire de verticale terrain pour me poser le plus rapidement possible sur la piste 33 herbe face à moi (piste plus large et longue que la bande revêtue et rarement emprunté par les autres aéronefs préférant la bande revêtue). J’ai réduit la puissance moteur, effectué quelques virages pour dégrader ma vitesse avant de me poser sans encombre.
Une fois immobilisé au packing et le moteur éteint, un membre du club, contacté par les contrôleurs de Marseille Provence, m’a rejoint. J’ai alors pu débriefer par téléphone avec l’un des contrôleurs m’informant au passage que mon alticodeur ne fonctionnait plus et que ma prise de décision était contraire aux règles de l’air occasionnant au passage des perturbations sur le trafic IFR de Marseille Provence.
Avec le recul, et malgré toutes les raisons évoquées ci-dessus, une meilleur analyse de la situation aurait probablement dû m’orienter sur un déroutement en direction du Castellet qui était accessible sans enfreindre les règles aériennes. Cette décision m’aurait également permis de réduire le temps de vol. Mes connaissances théoriques sur les conséquences d’une panne électrique et les règles de l’air, ma préparation du vol et ma formation pratique tout au long de ces 13 derniers mois auraient dû me conduire à privilégier ce choix.
J’ai pourtant pris la décision de revenir sur mon aérodrome de départ privilégiant un terrain familier, en situation de stress, à l’inconnue.
De plus, la nature du dysfonctionnement aurait dû me conduire à couper totalement l’alimentation électrique, quitte à perdre le transpondeur, afin de limiter le risque de départ de feu lié à un court-circuit (les contrôleurs disposaient d’un radar primaire pour suivre mon trajet et prévenir Eyguières ou l’agent AFIS du Castellet de mon arrivée).
Malgré une préparation soignée du vol, équivalente à celle effectuée le jour de mon examen PPL, je n’ai pas pris conscience de mon erreur en vol sur la limite inférieure de la CTA Toulon 2.
Mon expérience récente dans le domaine de l’aéronautique explique également certaines décisions et/ou erreurs.
Classification de l'évènement
La déclaration concerne :
Sécurité des vols (SV)
Catégorie :
Matériel
Nature du vol :
VFR Jour
Conditions météo :
CAVOK léger vent 5 à 10Kt Sud / Sud Est
Environnement :
Contrôlé (Classe A, B, C, D, E)
Phase de l'évènement :
En route
Type de vol :
Navigation
Type d'évènement :
Electricité: Panne
Type d’aéronef :
APM 20 Lionceau
Equipement :
Instrumentation mixte (aiguille + GPS par exemple)
Evaluation du risque
Traitement de l'évènement
En cas d'incident, il est indispensable de se référer aux consignes panne radio publiées.
Actions correctives : Debriefing réalisé après le vol entre pilote et contrôle aérien
Actions techniques préventives : Analyse de cette panne pour rechercher et déclencher les actions préventives de ce type d'incident.