Pour la 2e leçon d'une formation PPL, je vole pour la première fois avec un jeune élève. Nous avons commencé par un briefing, au cours duquel il y a eu de nombreuses incompréhensions dans le langage : donc nous utilisions l'Anglais et le Français. Nous avons passés beaucoup de temps à discuter sur des notions basique de vocabulaire aéro français (ex: horizon). L'élève était très dispersé, exprimant souvent d'autres choses, notamment philosophiques sur la vie. Nous avons établi des exercices, objectifs clairs pour le vol. Je me suis assuré qu'il comprenne bien en lui demandant de répéter. Nous sommes partis pour un vol local et en montée initiale, l'élève me demande "pourquoi il n'a pas les commandes ?". Je prends le temps de lui expliquer les raisons évidentes de sécurité liées à ce choix (La classe A, les trafics, la météo qui provoquait quelques turbulences,...). Pour ne pas le frustrer et perdre son dynamisme arrivé en croisière à 1450ft, je débute les exercices. Il commença par serrer très fort le manche de sa main droite. Je lui explique/démontre la bonne tenue du manche, mais j'ai eu beaucoup de difficulté à me faire comprendre/entendre. J'ai dû utiliser mes mains pour lui retirer les doigts du manche pour qu'il entende mes sollicitations. Nous avons continué avec les exercices, mais à chaque fois, il m'a fallu répéter 5 à 6 fois les éléments / démonstrations / exercices. L'élève manquait de concentration sur le cours. La météo provoquait quelques turbulences, pensant que ceci pourrait stresser l'élève, je l'ai rassuré plusieurs fois. Il était a priori confiant sur cela. Au cours des exercices, afin de maintenir la sécurité, la réglementation, j'ai apporté des "corrections d'instructeur" (Par exemple il effectuait une montée avec repère pare-brise. Il tira beaucoup trop sur son manche, je lui explique plusieurs fois la correction à effectuer. Ne voyant pas de changements et voyant la vitesse se rapprocher des limites, je pousse sur mon manche pour corriger et ramener l'avion vers un régime plus stable). Ces corrections ont eu, à plusieurs reprise, pour effet de provoquer des débats sur "pourquoi l'instructeur touchait aux commandes" et "que je le laisse faire". Je lui ai expliqué à chaque fois, toutes les raisons de ces choix. Parfois je ne touchais pas aux commandes, mais puisque ça turbulait, il pensait que j'y touchais. Et nous en rediscutions. J'ai noté, qu'au cours du vol, l'élève s'exprimait de façon différente. Il a eu également quelques moments de "chants", notamment par exemple, lorsque nous étions en finale et que je lui dis "it will be a little bit bumpy, but relax it will be fine". Il s'est alors esclaffé "bumpy, bumpy,bumpy..." en chantant pendant quelques minutes. A notre arrivée, il a demandé à l'un de mes collègues pourquoi je touchais aux commandes à certains moments. Puis lors de notre débriefing, qui a duré près de 1heure, il m'a été très difficile de centrer le sujet sur le vol, il ne répondait pas à mes questions telles que "Raconte moi ton vol", "Quelles ont été tes difficultés", "pourquoi veux-tu devenir pilote". L'élève centrait le sujet sur des débats philosophiques de la vie et n'a pas répondu aux questions. Après le débriefing, j'ai directement discuté de cet évènement avec le Président et le Chef Pilote : Défaut de ommunication, en particulier doute sur la compréhension de mes demandes, parfois celles-ci en lien direct avec la sécurité. Un probable défaut 'identification, par ses questions, de la légitimité de mon statut de commandant de bord, notamment sur mes décisions de récupérer les commandes. Et enfin, un défaut de concentration, réelles motivations, de la part de cet élève.
Classification de l'évènement
La déclaration concerne :
Sécurité des vols (SV)
Catégorie :
Non défini
Nature du vol :
VFR Jour
Conditions météo :
CAVOK
Environnement :
Non Contrôlé (Classe F, G)
Phase de l'évènement :
En route
Type de vol :
Instruction double commande
Type d'évènement :
Autre type de problème
Type d’aéronef :
DR 400/120
Equipement :
Instrumentation classique (aiguille)
Evaluation du risque
Traitement de l'évènement
1) Cette personne a clairement un profil psychologique particulier. Les instructeurs ne sont par armés pour y faire face, ni suffisamment sensibilisés sur cette problématique pas si rare. Il n'y a guère que l'écoute des premiers signaux faibles qui peut mettre la puce à l'oreille, mais est-ce suffisant ? 2) La fonction d'instructeur CDB nous parait évidente, mais l'est-elle pour le nouvel arrivant ? Il est probable qu'elle ne soit pas suffisamment verbalisée et exprimée lors des premiers vols, tellement cela nous semble aller de soi. Quand cette fonction est remise en cause, elle doit être rappelée avec fermeté si la reprise de commandes est en jeu, et le vol écourté si l'incompréhension subsiste. 3) L'instructeur a tenté de mener à bien sa tâche pédagogique jusqu'au bout, comme en témoigne le débriefing. Au vu de la capacité et de la volonté de cet élève d'apprendre, on peut se demander si il ne fallait pas renoncer, au même titre que devant une mauvaise météo. Ces aspects sont peu (pour ne pas dire pas) abordés lors des formations FI. Ils y ont pourtant toute leur place. 4) Une action de la FFA serait souhaitable pour étudier la mise à disposition d'un outil simple mis au point par un psychologue à disposition des instructeurs pour permettre la détection de comportements inadaptés.
Actions correctives : Interdiction de vol immédiate de l'élève. Entretien avec le président. L'élève a choisi de ne pas poursuivre sa formation.
Actions préventives : Verbalisation systématique lors du 1er vol de l'autorité du FI CDB en toutes circonstances. Explication en briefing lors des premiers vols de ce qui peut être attendu en matière d'accès aux commandes par l'élève.