Après une visite pré-vol, nous nous installons pour démarrer le moteur du D113. Nous faisons un check radio et interphone de bord,. mon élève constate qu'il ne m'entend pas. Je vérifie les jacks et rien n'y fait. Je vérifie l'interphone, de mon côté, en place droite, tout semble normal et je l'entends parler. Visiblement, il n'a pas de réception. Alors je décide d'échanger les casques pour vérifier. Je branche son casque en place droite, il semble fonctionner. Pour lever le doute, je branche mon casque en place gauche, et en effet je n'arrive pas à avoir la réception. En conclusion, le problème vient de l'avion. Je décide de poursuivre la séance en rebranchant son casque en place gauche, et le mien en place droite. Je lui indique qu'il peut faire la radio et je lui indiquerai toutes les conversations radio en parlant fort, ce que je fis. De mon côté, je l'entendais parfaitement dans l'intercom. Nous étions ce jour deux avions à l'aéroclub de Megève à voler. Je décidais de partir pour des séances d'intégration sur l'altiport de Megève. A chaque fois il annonçait par radio ses intentions et je lui indiquais en parlant fort la position de l'autre avion. Nous fîmes 5 tours de piste, soit un vol de 45 minutes. Tout se passait parfaitement bien et au dernier atterrissage, je décidais de le laisser partir seul. Je lui ai donné quelques instructions sur son vol et je décidais de lui brancher son casque, micro et écouteurs de mon côté. Rassuré, je le laissais faire son intégration à Megève. J'étais serein sur son niveau technique, sur la météo et sur l'environnement, avec un instructeur du club en tour de piste également. J'étais en retrait pour surveiller son vol. L'avion DR300 de Megève dans le TDP se pose et maintient au point d'attente. le Jodel D113 se présente en finale. Tout semble bien se passer. Je détourne mon attention dans le hangar quelques secondes. Le DR300 s'aligne et décolle et vois alors le Jodel D113 à l'arrondi. Le pilote du D113 panique et tente une remise de gaz pour finir dans les sapins au-dessus de la piste. Le DR300 poursuit son décollage et évite le Jodel D113 en virant sur la droite pour s'écarter de sa trajectoire d'atterrissage.
Je lance les secours, demande à la secrétaire d'appeler les pompiers. J'ai cherché l'avion quelques minutes avec d'autres témoins, la forêt est assez touffue derrière l'altiport. J'ai très vite trouvé le pilote, debout, indemne, à proximité de son avion, avion encastré dans les sapins. il me donna la clef des magnétos, désolé d'avoir terminé son vol dans les sapins. il avait pensé à couper la pompe électrique, la batterie avant d'évacuer l'appareil. Je me suis rendu sur le site de l'accident pour couper l'arrivée d'essence.
L'avion JODEL D113 avait rencontré quelques vols plutôt des problèmes électriques. La pression d'essence clignotait et des bruits parasites interféraient dans les écouteurs des casques. La mécanique avait été prévenue et avait trouvé un fil en partie dénudé en contact sur le bloc de l'alternateur. Une fois réparé, le problème de parasites avait disparu. Le vol suivant la réparation était le 07 septembre 2019, notre séance.
L'élève pilote volait régulièrement sur D113. C'était le premier vol du matin. La météo était clémente, pas de vent, ni de turbulence, le ciel était couvert avec un plafond supérieur à 10 000 FT.
Ma première impression suite à la détection du problème d'intercom était d'annuler la séance. Mais M.XXX* venait de loin pour voler et je pensais pouvoir m'accommoder de cette situation.
Suite à l'incident, après avoir réconforté le pilote et dirigé les pompiers vers le lieu de sinistre, j'ai voulu comprendre pourquoi, un tel accident venait de se produire. Je suis allée voir l'instructeur du DR300 et il m'a assuré de ne jamais avoir entendu le D113 à la radio pendant toute la durée de son solo. J'ai demandé au pilote du Jodel D113 si il avait fait toutes ses communications et il m'assure que oui. Je ne comprenais pas pourquoi l'instructeur du DR300 ne l'avait pas entendu et vu. Entre temps un membre du bureau du club arrive et je lui explique la situation. Puis je lui parle de mes problèmes radio et aussi du branchement de casque côté droit afin d'entendre les communications radio. Il me répond alors que pour parler à la radio, il faut appuyer sur l'alternat correspondant au côté où est branché le casque. Le pilote entendait parfaitement, mais n'envoyait que la porteuse en émission. Pensant bien faire en lui commutant de mon côté son casque, je le privais d'émission radio. Je connais bien ce fonctionnement, mais au moment du lâcher j'ai oublié ce problème.
Le DR300 était persuadé d'être seul en local, après que je me sois posé. L'instructeur avait assuré la sécurité visuelle et la radio avant de re-décoller pour son dernier tour de piste. le pilote du D113 avait entendu le message du décollage mais voyant l'avion poursuivre, sa réaction a été de remettre les gaz. Nous enseignons en montagne que la remise de gaz est impossible. Le pilote du D113 en était convaincu mais il a agît autrement par instinct de pilote de plaine.
Remarque : Il est possible de se poser à Megève avec un avion au décollage, la largeur et l'environnement en herbe autour de la piste le permet. Chaque appareil serre à sa droite. Nous le montrons d'ailleurs en instruction pour rassurer les pilotes. Des incidents de ce type se produisent surtout avec des ULMs extérieurs.
Classification de l'évènement
La déclaration concerne :
Sécurité des vols (SV)
Catégorie :
Matériel
Nature du vol :
VFR Jour
Conditions météo :
CAVOK, pas de vent
Environnement :
Non Contrôlé (Classe F, G)
Phase de l'évènement :
A l'atterrissage
Type de vol :
Solo supervisé (laché, nav solo, ...)
Type d'évènement :
Risque d'abordage
Type d’aéronef :
JODEL-D119
Equipement :
Instrumentation classique (aiguille)
Evaluation du risque
Traitement de l'évènement
Sur altiports, les axes de décollage et d'atterrissage sont opposés. Une vigilance extrême est requise durant les phases de décollage et d'atterrissage pour éviter une situation conflictuelle entre trafics opposés.
La réglementation impose l'usage de la radio lors des évolutions sur altiports et altisurfaces, et l'émission de messages aux positions caractéristiques du circuit d'aérodrome.
Sur l'altiport de Megève, la visualisation des avions en finale est particulièrement malaisée à cause de l'arrière-plan montagneux qui contribue à masquer les trafics.
Le pilote au décollage n'a pu identifier la présence d'un trafic en finale du fait des conditions de visibilité médiocres, de l'absence de message radio et de l'absence de dispositifs lumineux de l'avion à l'atterrissage.
Le pilote à l'atterrissage a pensé procéder aux messages radio réglementaires sans avoir conscience du dysfonctionnement de la radio. Le fait que l'interrupteur d'émission coté gauche n'agissait pas sur le casque branché coté droit n'avait pas été pris en compte.
Une action réflexe a incité le pilote du D113 à engager une procédure de remise de gaz incompatible avec l'environnement de l'altiport malgré les messages pédagogiques multiples mettant en garde contre une telle manœuvre.
Lors de l'échange des casques pour résoudre le dysfonctionnement, un "essai radio" avec une autre station aurait dû être effectué.
Lors d'un lâché/solo, il est toujours souhaitable de réunir les conditions optimums pour ne pas stresser l'élève. Dans ce cas, il aurait été envisageable de reporter le vol solo.
Actions correctives : Refaire voler rapidement les personnes impliquées dans l'accident.(chose faite) L'instructeur qui supervise un lâcher sera en écoute radio avec une radio portative.
Actions préventives : Rappels aux pilotes du club : - importance du contrôle radio avant le déplacement vers le point d'attente : fréquence radio, volume de la réception et message de test radio - importance des messages radio avant décollage et en finale, ainsi qu'aux positions caractéristiques du circuit d'aérodrome - importance de la surveillance visuelle avant décollage (détection des avions en panne radio ou émettant sur une fréquence erronée) - respecter un temps d'attente suffisant au point d'attente avant d'entreprendre le décollage pour permettre, à un avion en courte finale d'atterrir et de libérer la piste (NB : la réglementation impose un temps d'attente "suffisant"...) - impossibilité de toute remise de gaz lorsque l'avion est établi en finale à *Megève* (NB : pas forcément vrai pour les autres altiports) - procédure d'évitement spécifique à l'altiport de Megève : en cas de situation conflictuelle lors des phases de décollage/atterrissage (NB : procédure d'urgence, discussion faite enr réunion instructeur des conditions à réunir pour la travailler)
Recommandations matérielles, à appliquer à l'ensemble des avions du club : - installer des phares de bord d'attaque haute intensité - installer des feux à éclats ("strobes") - installer un dispositif d'alarme type FLARM sur toute la flotte avertissant d'une situation de trafic conflictuel et FORMER LES PILOTES A SON UTILISATION.