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Rupture partielle du train avant au roulage
Ref : 42TQT60XYCH

Dates

Date de déclaration : 07/09/2024
Dernière modification : 07/09/2024
Date de clôture : 07/09/2024

Descriptif de l'évènement

[Rupture partielle du train avant au roulage]
En vue d'un vol prévu sur le P2002, l'instructeur effectue le passage de relais avec le pilote précédent: rien n’est à signaler. L'avion est repositionné sur le parking prêt au départ sans utiliser la fourche. La prévol est effectuée sans rien révéler d'anormal. La mise en route et l'essai de frein se déroulent normalement.

Lors du roulage, au premier taxiway l'élève roule trop à gauche puis presque dans l'herbe. Elle pense que l'instructeur intervient aux commandes car elle ressent une grande force contraire aux palonniers. L'instructeur reprend les commandes et constate une difficulté de contrôle latéral. Il fait demi-tour sur le premier taxiway où cela est possible. Palonnier en butée l'avion est juste contrôlable pour revenir au parking.

Au parking l'instructeur constate une attitude anormale de l'avion, due à la rupture au niveau de l’une des deux charnières reliant la jambe du train avant au bâti moteur. On constate une rupture nette de la soudure reliant la jambe de train à la charnière supérieure sur le bâti moteur et de possibles traces de corrosion.
N'étant pas au courant d'une possible fragilité, je n'ai pas regardé en détail la soudure lors de la visite prévol. Sur un plan mécanique, il y a clairement une fragilité créé par la soudure sur le tube de la jambe de train. Et une possible corrosion.

Classification de l'évènement

La déclaration concerne : Sécurité des vols (SV)
Catégorie : Matériel
Nature du vol : VFR Jour
Conditions météo :
Environnement : Non défini
Phase de l'évènement : Au roulage
Type de vol : Instruction double commande
Type d'évènement : Roulette de nez
Type d’aéronef : P 2002 Tecnam
Equipement : Instrumentation classique (aiguille)

Evaluation du risque

Traitement de l'évènement


Observations:
A la suite de l’événement la rupture est analysée on constate que les traces brunes pouvant faire penser à de la corrosion correspondent à un dépôt gras largement présent sur la partie basse du fuselage. Il s’agit plus probablement d’une agglomération de poussière et d’un peu de graisse provenant des charnières ou d’autres éléments mobiles. Ce type de dépôt est typiquement retiré par l’atelier mécanique lors des nettoyages approfondis.
La rupture a eu lieu au niveau du contour de la soudure entre la charnière supérieure du train d’atterrissage et le tube de la jambe de train.
La rupture est nette et suit tout le contour de la soudure. Le découpage est franc et ne laisse pas apparaitre de trace de corrosion sur la tranche
Le train avant est relié au bâti moteur par deux charnières : la charnière inférieure est vérifiée, elle ne laisse pas apparaitre de trace d’amorce de rupture.

Analyse:

Historique de l’avion
8 Mois avant l’événement les rondelles de caoutchouc assurant l’amortissement du train avant ont été changées après qu’il ait été constaté qu’elles étaient écrasées. A cette occasion, l’atelier mécanique a effectué un contrôle non destructif (ressuage par produit de type ARDROX ®) au niveau du train avant qui n’a pas révélé de crique.
10 jours avant l’événement la tour de contrôle signale à un pilote du club que l’avion a effectué un atterrissage anormal (arrivée trop rapide lors de laquelle un rebond a été observé). A l’issue, un contrôle est effectué par le mécanicien qui ne détecte rien d’anormal. Le pilote de l’événement confirme le rebond suite à l’arrivée trop rapide mais indique avoir atterri sur le train principal et ne reporte pas avoir ressenti de toucher dur.
4 jours avant l’événement (le 10 Avril 2024) un instructeur signale un atterrissage dur toujours sur le train principal. L’examen du train ne fait rien ressortir d’anormal.
Aucun problème n’est déclaré lors des autres vols précédant l’incident (la plupart effectués en instruction ou par des pilotes confirmés). Le pilote du vol précédant immédiatement l’événement n’a pas non plus reporté d’atterrissage dur ou d’anomalie particulière.

Analyse de la rupture
L’analyse visuelle de la rupture ne révèle pas de corrosion. La soudure elle-même est intègre: la déchirure s’est faite sur le métal du tube de la jambe de train en bordure de la soudure. Cette partie est naturellement la plus fragile de l’ensemble, celle-ci étant naturellement altérée par la chaleur apportée lors de la soudure (zone affectée thermiquement).
Selon le représentant du constructeur consulté pour avis, le type de rupture observé est symptomatique d’une sollicitation excessive du train avant (atterrissage durs successifs et/ou sur la roue avant).

Conclusions
L’événement est probablement du à la rupture en fatigue de la liaison entre la charnière supérieure du train avant et le tube de jambe de train. Le train était probablement déjà fragilisé quelques mois avant l’événement suite à une/des sollicitations importantes comme en témoignent les rondelles de caoutchouc tassées. Les deux atterrissages anormaux survenus à quelques jours d’intervalle peu de temps avant l’événement pourraient également avoir fragilisé le matériau sans qu’on puisse néanmoins l’assurer.


Enseignements de sécurité
1. Comme tous les avions à train tricycle, le mécanisme du train avant n’est pas fait pour encaisser des efforts anormaux. L’atterrissage doit se faire sur le train principal en laissant descendre doucement la roulette avant lorsque la vitesse diminue. Une vitesse d’approche excessive peut conduire à des rebonds suivis d’un atterrissage dur sur le train avant.
2. Il est essentiel que les pilotes et instructeurs reportent systématiquement tout atterrissage dur.
Cela permet un examen approfondi pour détecter d’éventuelles anomalies (criques etc…)
3. Une attention particulière doit être accordée lors des visites prévol pour détecter toute anomalie, notamment en vérifiant l'état général des charnières de la jambe de train, sachant qu'elles peuvent être soumises à des contraintes importantes.
4. Lors du roulement au décollage sur Tecnam adapter l’action à la profondeur:
.Piste en dur: appliquer une légère action manche avant pour maintenir l’adhérence de la roulette
Cela permet d’éviter le ripage de la roue avant et assure le maintien de l’axe.
Il faudra souvent ajouter du pied à droite à la rotation, la roulette n’aidant plus à la tenue d’axe
.Piste en herbe : appliquer une légère action manche arrière pour soulager la roulette avant
Cela permet de préserver la roulette avant des chaos de la piste
Il faudra plus de pied à droite dès la course au décollage la roulette étant alors moins efficace
5. Lors du roulage sur Tecnam, préserver la roulette avant et les éléments qui lui sont liées:
. Sur piste en herbe ou sol chaotique rouler manche au ventre
. Ne pas freiner et tourner en même temps : soit freiner soit tourner mais pas les deux
(particulièrement lorsque l’on dégage une piste)
. Pas de vérification du débattement palonniers lors de l’essai des commandes avant décollage
Il est inutile de vérifier le débattement des palonniers, un problème aurait été détecté au roulage.
6. Lors des manipulations au sol, lorsque l’on fait tourner l’avion en abaissant la queue, il est impératif de stopper la rotation avant de reposer le train avant pour éviter des efforts latéraux.
7. Lorsque l’on manipule l’avion au sol à l’aide de la fourche, ne pas forcer sur les butées latérales.

Actions correctives:
. Réparation du train avant

Actions préventives:
. Réflexion sur une vérification du train plus fréquente ou un contrôle approfondi à chaque atterrissage dur
. Diffusion du REX aux membres